Les épaules des grand-mères

Que retiendra la Haute-Marne de cette 11e semaine ? Peut-être l’annonce de la livraison imminente de plus de 30 000 doses de vaccins (JHM du 20 mars). On notera avec malice que l’autorité précise que ce sont des Pfizer. Pour les suspicieux, au cas où…

Deux pages plus loin, une consœur qui a des lettres évoquait en ces termes les douze derniers mois du Conseil départemental : «Annus horribilis». Pourquoi tant de “n” s’étonne un lecteur vétilleux qui soupçonne une crise hémorroïdaire au sein de la docte assemblée. Nenni ! Il s’agit bien d’une expression latine que l’on peu traduire hâtivement par : on en a plein le…

…Plein le dos ; car il faut se souvenir d’où l’on vient : l’an dernier à pareille époque, le débat ne portait que sur les masques… qui faisaient défaut ! Des petites mains en cousaient dans l’arrière-cuisine. Le Conseil départemental se démenait pour nous en offrir ; lesdits objets, convenons-en peu seyants, ressemblaient tellement aux culottes de ma grand-mère (elle avait le dos large et les hanches confirmaient les proportions aux épaules) qu’ils sont devenus collectors ! On les ressortira pour carnaval, les années où l’on pourra festoyer.

Parce que cette année, pour festoyer…

Tenez : pas de foire de Pâques à Saint-Dizier ! (JHM du 19 mars) : le genre de détails qui trahit plus que tout soubresaut erratique de la courbe du taux d’incidence le grand désarroi de ces jours maudits.

Revenons aux vaccins. Ce qui compte, à court terme, ce n’est pas le nombre de doses pour x habitants ; c’est le nombre de doses pour x vieux. Or, pour notre aimé territoire, cela donne donc à peu près 30 000 doses pour 179 000 épaules. On relativise, hein ! Non, je badine…

Moins drôle ; et tellement touchant ; tellement beau : le courrier des lecteurs, d’une lectrice, Alexandra Buecher. Elle rend visite à sa grand-mère à l’Ehpad de Fayl-Billot (JHM de samedi p. 2). Ce dialogue là, admirablement ciselé, rassemble en peu de mots tant de choses pudiques, profondes, sur le récit absent, qui reste à écrire, de la pandémie à l’aune des vies minuscules telles que magnifiées par Pierre Michon*. C’est admirable en littérature. C’est à portée de nous dans tous les Ehpad de Haute-Marne.

*Folio. 1996. 256 p.

JHM du 21 mars 2021

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